Anorexie / Boulimie, addictions et dépendances

Anorexie / Boulimie, addictions et dépendances

Amour et nourriture, un enjeu émotionnel complexe…

Mais qu’est-ce que l’amour ?

Le sentiment d’amour procède à la fois d’un élan vers les autres, vers quelques personnes ou vers une personne en particulier qui devient alors l’objet de toute notre ferveur amoureuse, de toute notre attention, de toutes nos attentes émotionnelles.

Or, plus notre amour s’adresse à une population large (voire à l’humanité en général), plus il est authentiquement fraternel et désintéressé ; c'est-à-dire sans attente de retour par rapport aux personnes qu’il englobe. Et, plus il est circonscrit (amour familial ou conjugal), plus il nourrit des attentes démesurées par rapport aux personnes aimées, des projections, des injonctions… jusqu’à une jalousie dans certains cas morbide. L’amour – par effet miroir – c’est aussi un sentiment, plus ou moins conscient et accepté (et souvent plus passif), éprouvé par celui/celle qui reçoit cet amour et n’y répond pas nécessairement par un amour de même nature ni de même intensité et avec des attentes et des projections ainsi différentes, sans nécessairement que l’autre l’imagine. Car – curieusement et malgré parfois des années de vie commune – nous ignorons souvent les croyances, les valeurs, les besoins (intellectuels, émotionnels et/ou matériels) et les attentes de nos conjoint.e.s.

Le cas d’un amour fraternel et universel s’illustre par exemple par Mère Teresa qui n’avait pas d’attentes par rapport aux personnes qu’elle accueillait, aimait, encourageait et soignait, hors de toute logique de réciprocité. Ceci ne signifie pas qu’elle ne trouvait pas de joie à la contemplation du sourire accroché alors sur les visages, ni de satisfaction d’amour propre à bien faire.

Au rebours d’un amour fraternel ou universel, l’amour exclusif (amour conjugal ou érotique) est souvent pollué par des poisons, comme des attentes démesurées, des injonctions, des reproches, de la jalousie, du mensonge, un sentiment d’étouffement ou de culpabilité, voire même des violences…

Erich Fromm dans l’Art d’Aimer postule ainsi que le creuset de tout amour véritable, c’est l’amour fraternel (tel que celui que distribue notamment Mère Teresa pour reprendre son exemple). Mais en matière d’amour désintéressé, c’est pourtant bien l’amour maternel qui vient le plus immédiatement à l’esprit et qui est à la fois le moins contesté. Ce même amour bienveillant et inconditionnel que nombre d’adultes en proie à leurs blessures d’enfants se tourmentent de ne pas retrouver chez leur conjoint.e.

Cet amour maternel (et aussi l’amour paternel, toutes choses égales par ailleurs) est à la fois un élan naturel et irrépressible vers l’enfant aimé (sauf rares exceptions) et à la fois une énergie et un engagement sans faille pour le protéger, le nourrir, le soigner, le rassurer et le cajoler… parfois même jusqu’à l’excès, jusqu’à l’asphyxie. Cet amour des parents est ce qui fait d’eux les “figures d’attachement” de l’enfant, par excellence.

Qu’est-ce qui relie amour et nourriture ?

La nourriture, dans notre souvenir infra conscient, c’est d’abord le lait maternel et un des premiers liens – à la fois matériel et à la fois émotionnel – de la mère à son nouveau-né, la première expression de ce don maternel, le premier éveil à la sensualité d’un sein nourricier qui a été, d’instinct, reniflé, mordillé et tété. Or, à la différence de nombreuses espèces animales, le petit d’homme est peu autonome à sa naissance, incapable de seulement ramper ou de se tenir assis ; c’est-à-dire tout à fait dépendant et vulnérable. Ce qu’il accomplira plus tard sera le fruit d’un apprentissage long et laborieux. Cependant la quasi seule chose qu’il saura faire d’instinct (notamment grâce aux phéromones du sein maternel qui sauront déclencher les algorithmes ad hoc) c’est prendre ce lait nourricier (et/ou ses substituts industriels) et recevoir son amour, entrant ainsi de fait dans une sorte de tête à tête amoureux, pour de longues années.

Pourtant, l’enfant n’est pas le seul à devoir faire un apprentissage (celui du monde des adultes et de l’altérité), car le chemin à parcourir par ses parents pour tenter de comprendre ses besoins et ses attentes est tout aussi important, mais peut-être contre-intuitif.

Il convient ainsi d’observer patiemment le nourrisson pour parvenir à comprendre ses différents modes de communication, ses attentes et/ou ses émotions et surtout ses besoins.

Ainsi, il faut à tout prix éviter de commettre l’erreur de confondre don de nourriture et don d’amour. En particulier, lorsqu’un enfant pleure – au rebours de ce que prétendent nombre personnes mal informées – il ne faut surtout pas lui donner systématiquement le sein ou le biberon… et surtout pas au premier pleur. Le pleur de l’enfant exprime une émotion que l’adulte doit apprendre à décoder progressivement car ce que demande l’enfant c’est très souvent seulement de l’attention, des caresses et de l’amour. Pour l’enfant, le simple toucher bienveillant n’est pas anodin. Lorsqu’elle est caressée la peau de l’enfant perçoit une bonne énergie, sous forme d’un courant électrique immédiatement communiqué à son cerveau, à l’aide de protéines piézoélectriques. Ces protéines constituent un « canal ionique » qui passe à travers la membrane cellulaire. Lorsqu’elles détectent la force mécanique, ce canal s’ouvre pour permettre aux ions de passer dans la cellule, en lançant une chaîne d’événements qui envoient un signal au cerveau – en d’autres termes, les cellules piézo-protéiques contrôlent la sensation du toucher. Les caresses permettent l’apaisement de l’enfant par la diminution de sa pression artérielle et de son rythme cardiaque, concomitantes à l’augmentation du taux d’ocytocine sanguin (hormone de l’attachement et du plaisir).

Par un mécanisme analogue, un simple sourire et/ou un regard bienveillant croisant le regard de l’enfant déclenche chez lui la sécrétion d’ocytocine, Il faut donc ne pas commettre l’erreur de donner de la nourriture à un enfant qui réclame seulement de l’attention et de l’amour. Le risque c’est de dérégler le système de perception de l’enfant et faire passer cette nourriture comme un succédané d’amour ou comme un moyen de se mettre à distance de son besoin véritable en lui mettant un bouchon dans la bouche (le sein ou la tétine), là où il aurait voulu un regard, un sourire, des caresses et de la tendresse.

Il est en effet indéniable que nombre de parents stressés et/ou fatigués mettent volontiers un biberon dans la bouche du nourrisson quand ils imaginent qu’il pourrait avoir faim et – pire – une fausse tétine en toute circonstance pour le faire taire.

Mon propos n’est pas ici de stigmatiser des conduites passées de parents de bonne volonté (bien que peu informés), mais de soumettre à la réflexion des parents de demain – et aussi des personnes qui les entourent et les conseillent – la question de l’intérêt véritable (ou de l’inconvénient) de mettre un bouchon dans le bec des enfants qui pleurent, plutôt que de tenter de comprendre pourquoi ils pleurent. Et lorsque ce bouchon est un leurre (fausse tétine) la question est encore plus aiguë, car l’émotion exprimée par l’enfant reste incomprise, niée et rejetée par le parent. La frustration du nouveau-né, sa colère et ses pleurs ne peuvent ainsi que s’amplifier, jusqu’à devenir pour lui intolérables.

Cette coupable négation du besoin et de l'émotion du jeune enfant a un irréversible pouvoir destructeur sur son cerveau

Les émotions sont une réaction physiologique à un événement extérieur. Elles nous aident à ressentir, à réfléchir, à agir et à interagir. Elles constituent ainsi une partie primordiale de notre processus cognitif et notamment le socle de toute communication entrante et sortante.

Les parents du nouveau-né (comme plus tard les enseignants) doivent respecter les émotions des enfants et les inviter à les exprimer. C’est ainsi que se développera leur intelligence émotionnelle, part majeure et décisive du déploiement de leur système cognitif et incroyable vecteur de leur intérêt, de leur éveil et de leur apprentissage. En effet, les émotions positives des parents dans leur interaction avec le nouveau-né (comme, plus tard, de l’enseignant avec ses élèves), stimulent leur intérêt, car les enfants sont de véritables éponges à émotions.

À l’inverse, si l’on ne respecte pas les émotions des bébé ou des enfants, si on les punit et si on leur fait “ravaler” leur colère sans les écouter, on provoque chez eux un incontrôlable stress, d’autant plus grave que les jeunes enfants n’ont pas de référentiel en matière de violence, de danger ou de stress.

Le stress ou la peur provoque alors la sécrétion de cortisol dans le corps de l’enfant. Produit par une glande endocrine, le cortisol se déverse dans le sang pour modifier le fonctionnement d’organes en souffrance et même du cerveau. Bénéfique en quantité limitée, le cortisol est cependant un poison à haute dose,

Une pédagogie axée sur la menace, le chantage, les cris, les punitions et les coups place les nouveaux-nés et tous les enfants (comme d'ailleurs les adultes) en état de stress majeur. Par défense, la sécrétion, dans leur organisme, dudit cortisol est donc activée.

Il en va de même – dans une plus grande proportion et de manière bien plus traumatique encore – pour les abus sexuels et viols dont sont victimes, parfois depuis leurs plus jeunes années, pas moins d’un enfant sur cinq en France et ce dans le plus assourdissant silence qui soit. Les dégâts de ces traumatismes de toute nature et de toute ampleur sont malheureusement quasi irréversibles.

À haute dose, en effet, le cortisol est malheureusement hautement délétère.

Ses effets au plan psychologique sont notamment les suivants :

  • sentiment d’être sans force, sans courage, triste, en grande insécurité,

  • sentiment de menace et d’angoisse,

  • sentiment que le monde est hostile et agressif,

  • inhibition, blocages.

En cas de stress majeur et/ou répété (peur par anticipation / angoisse ou panique) ou de peurs chroniques, les effets physiologiques du cortisol sont délétères sur l’organisme de l’enfant.

Une anarchique et fréquente production de cortisol peut en particulier détruire une partie du cerveau des jeunes enfants. Les conséquences sont ainsi la destruction de neurones dans tout le cerveau. Ce qui entraîne en particulier :

  • dans le cortex préfrontal : difficultés d’apprentissage, de concentration, de gestion des émotions
  • dans l’hippocampe : problème de mémorisation,
  • diminution du volume cérébral général,
  • destruction de la myéline qui favorise les connexions…

Plus grave encore, la stratégie d’adaptation des espèces vivantes conduit les enfants, victimes de telles violences, à s’adapter en inhibant leurs émotions et en diminuant leur sensibilité émotionnelle. Il s’ensuit, par le phénomène bien connu d’épigénétique que cette perte de sensibilité émotionnelle est transmissible à leur descendance.

S’agissant des troubles du comportement alimentaire qui nous intéressent, en l’espèce, on n’a aucun mal à imaginer le stress de l’enfant qui n’est pas compris et son enfermement dans un sentiment d'incompréhension (potentiellement perçu comme un rejet). Nulle surprise, alors, à le voir se refermer sur lui-même et/ou à vouloir punir son parent-bourreau (qui est à la fois sa principale figure d’attachement) en refusant la nourriture qu’il paraît avoir tant de bonheur à lui voir avaler.

Or, le sentiment de l’enfant qui pleure, sans qu’on réponde dans le sens attendu au besoin qu’il exprime (qui n’est pas toujours une demande de nourriture… et surtout pas de gavage) est bien vite remplacé par d'autres frustrations auxquelles il prendra l'habitude de répondre de même manière (stress => cortisol). C’est ainsi notamment qu’il pourra s’affirmer à son tour comme capable de refuser à ses parents le plaisir suprême qu’il lit sur leur visage, lorsqu’ils le voient manger.

Le Dr. Catherine Gueguen décrit à merveille ces phénomènes / cf. 4 Interviews =>

On voit bien dans cette première expérience du tête à tête amoureux mère-enfant (bientôt relayé par celui du père, souvent tout aussi attentif et protecteur,) un possible élément d’explication à plusieurs types de troubles du comportement alimentaire, même si ceux-ci n'apparaissent que bien plus tard, lors de la préadolescence.

On sait que l’amour n’est pas toujours simple et, comme évoqué, plus haut qu’il embarque souvent avec lui une cohorte d’attentes démesurées, de tentation de tester l’amour de l’autre en le mettant à l’épreuve, en le faisant souffrir pour voir le sujet aimant redoubler de soins et mettre en œuvre avec un zèle accru ses démonstrations protectrices. Le sujet des TCA est donc d’une infinie complexité et les hypothèses exposées ici sont à prendre avec précaution et ce sans négliger toute la littérature en la matière.

L’anorexie, une maladie complexe, protéiforme et mal connue

Refuser la nourriture (premier symbole de l’amour maternel) est une manière de mettre à distance ou en perspective cet amour. Chez l’enfant anorexique, c’est le premier mode d’affirmation, le premier « non » véritable que l’enfant – en toute puissance – peut opposer à ses parents, comme s’il disait : « Vous vous êtes débarrassés à bon compte de mes pleurs et de mon besoin d’attention, de caresses et d’amour quand j’étais nourrisson en me collant un tétine dans la bouche ou en m’enfournant des petit pots premier âge jusqu’à l’écœurement et à la colère, par abus de ma faiblesse, mais aujourd’hui c’est moi qui tiens le couteau par le manche ! Je suis en mesure de vous faire du mal, beaucoup de mal et on va voir qui est le plus fort ! »

Refuser l’amour parental à travers l’anorexie, c’est aussi une manière de le gérer et de conjurer la hantise de l’abandon. C’est une façon de s’affirmer ainsi comme une personne capable de se priver par un acte volontaire de cet amour. Devenir acteur de cet abandon programmé (puisque les parents ne sont pas éternels ni la famille un milieu stable sur la durée) est une façon de ne pas subir l’intolérable attente que le temps nous impose. Refuser la nourriture (et partant l’amour des parents) est à la fois un moyen de le tester et souvent de le voir redoubler, car inconsciemment les sujets anorexiques savent mettre en scène leur naufrage pour attirer toute la ferveur familiale et tenter de s’en libérer, d’alléger le poids des émotions, de se mettre sur pause, de serrer les dents (à tous les sens du terme) face à l’implacable fatalité du chaos annoncé…

En outre, en refusant de manger, les sujets anorexiques refusent aussi de grandir, de devenir adultes, prétendant ainsi peut-être inconsciemment stopper l’avancée du temps. De même manière que le suicide est parfois l’ultime manière, dont les sujets angoissés par la perspective de la mort, prétendent se soustraire à l’odieux arbitraire de son caprice, l’anorexique est souvent conscient de l’issue fatale de sa privation de nourriture, mais voit cette perspective, celle de mourir avant ses parents, comme une façon de ne jamais les perdre.

On répugne souvent à parler de psychose de l’enfant. Nul doute cependant que certaines anorexies flirtent avec ce concept de psychose, en cela qu’elles dépassent par leur complexité et leur gravité de simples troubles alimentaires. Elles tuent surtout bon nombre de jeunes sujets qui en sont atteints et, pour ceux qui n’en meurent pas, compromettent à jamais certains processus physiologiques et attaquent des organes vitaux. L’anorexie ralentit aussi la croissance physique, le développement psychologique et compromet une intégration sociale et une vie normales.

Certains types d’anorexie s’expliquent par le refus de voir cesser un jour cette protection parentale à travers le refus de la croissance et de la puberté. C’est ainsi que les jeunes filles (qui représentent la majorité des sujets anorexiques) parviennent à retarder la survenue de leurs règles jusqu’à n’en avoir parfois jamais, en sorte d’être toujours le sujet protégé et jamais de sujet maternel qui aura un jour à se passer de la protection maternelle et d’avoir même à protéger à son tour.

Dans ce psychodrame qui se joue entre mère et fille, la jeune anorexique s’enferme parfois à son insu dans un délire égocentrique et de toute puissance entraînant sa famille entière dans l'abîme où la conduit la folie destructrice de sa maladie.

Peu de parents, frères ou sœurs ont alors la compréhension de la manipulation toxique bien qu’inconsciente qui vise à les broyer à leur tour, en les soumettant impuissants à l’impensable mort imminente de l’être aimé. Ils subissent ainsi la double peine de ne pas avoir été à la hauteur, de ne pas avoir su comprendre la maladie, l’apprivoiser et ainsi soustraire la fille ou la sœur aimée à ses griffes et à une mort annoncée et mise savamment en scène.

On ne peut que plaindre les jeunes victimes que cette terrible maladie emporte, mais c’est aussi ceux qui restent qui sont à plaindre, condamnés à suspendre leur souffle, faire taire leurs propres angoisses, leurs propres blessures, leurs propres projets pour être tout entiers suspendus au rôle de témoins de l’agonie de celle qui la maladie immole lentement devant eux.

Les structures d’accueil et hôpitaux spécialisés sont souvent pris en défaut par l’intelligence mortifère des jeunes filles anorexiques et incapables de les comprendre et de tordre le cou à leur maladie. Le gavage est alors parfois un recours, nécessaire au plan physiologique (ne serat-ce que pour entretenir le reflexe de déglutition), mais il représente une agression odieuse, voire un viol, au plan psychologique. Et ceci pénalise le rapport de confiance entre les thérapeutes et les jeunes patientes.

La famille a souvent l’interdiction de se manifester pendant des semaines, voire des mois,, tant il est probable que – dans nombre de cas d’anorexie la relation du sujet anorexique à sa famille puisse s’analyser comme une relation toxique, de manière symétrique ou non, et bien entendu sans aucune conscientisation de part ni d’autre de cette toxicité.

L’isolement des sujets mineurs dans de telles structures présente en effet le double avantage :

  • de briser le jeu pervers (bien qu’inconscient) qui s’est établi au cours des années entre parents et enfant anorexique qui entretient la maladie ;
  • et d’épargner un peu les familles et (pour quelques cas mieux compris ou plus réceptifs) de conduire les malades à la guérison.

L’ambivalence de l’anorexie, c’est aussi qu’elle peut manifester le besoin de créer du vide à l’intérieur de soi pour accueillir ou créer du désir (laisser de la place au désir), chez des sujets apparemment privés du désir de désirer comme de toute appétence.

Boulimie, addictions et dépendances

La boulimie et différentes addictions sont parfois perçues comme répondant à un besoin de se rassurer, de se faire du bien instantanément (en particulier en ingérant des glucides). Or, comme on l’a vu plus haut, la nourriture est souvent inconsciemment associée à l’amour maternel. Cet amour protecteur qu’on invoque inconsciemment ou qui manque cruellement à l’enfant blessé que nous restons parfois à vie, par exemple en situation de stress, d’échec, de deuil… ou quand on éprouve un sentiment de vulnérabilité, de colère ou de frustration.

Tous les sujets ne réagissent pas par un dérèglement du comportement alimentaire en situation de stress ou lors d’épreuves de la vie, mais, pour bon nombre de personnes la nourriture et en particulier le sucre (qui déclenche quasi immédiatement la sécrétion de dopamine, hormone de la récompense) ou encore l’alcool, le tabac et les drogues (dures ou réputées plus douces, mais cependant toxiques) représentent un refuge.

Il est ici à noter que le sucre partage avec ces substances toxiques une bien funeste caractéristique, c’est son caractère addictif ; ce qui rend le sevrage ardu. Or, on peut dire des substances addictives (et des dépendances qu’elles entraînent) qu’elles constituent de fausses réponses à des vrais problèmes. Les vrais problèmes étant souvent des blessures d’enfance, combinés ou non à des échecs, des frustrations et/ou du stress du quotidien. C’est pourquoi prétendre agir sur le symptôme (les addictions, les dépendances ou les troubles du comportement alimentaire), par des conseils diététiques ou d’hygiène est illusoire.

La vraie est la seule réponse, c’est de considérer le trouble psychique et de tenter d’en comprendre tous les contours et tenter de le soigner ou de l’apaiser, par tous les moyens dont disposent la psychologie, la psychiatrie ou l’addictologie modernes, tous visant d’ailleurs à tenter de responsabiliser le patients en l’informant sur les mécanismes à l’œuvre et les enjeux de la dépendance où ils sont tombés, en l’associant au travail thérapeutique.

S’agissant de la boulimie, elle est favorisée par la consommation de sucre qui perturbe la sensation de satiété et augmente de fait l’ingestion quotidienne de nourriture. On peut ainsi, à bon droit, considérer le sucre comme une drogue dure… mais pas dure à trouver et surtout pas chère.

Le sucre est en effet un agent de conservation et de sapidité dont l’industrie alimentaire abuse, de manière massive, mais discrète (voire clandestine, si l’on considère le caractère illisible d’étiquettes qu’il faudrait lire à la loupe). Les enfants sont les premières cibles de ce marché puisque, pour les acteurs de la filière sucrière et de l’industrie alimentaire, il convient dès le plus jeune âge de les fidéliser (de les piéger) à vie. Ils sont ainsi empoisonnés tout petits par les bonbons, gâteaux industriels, céréales en boîtes, sodas, barres chocolatées, ketchup… et autres confiseries, c’est-à-dire par le sucre sous toutes ses formes, sucres lents (frites, pâtes, riz en particulier) et rapides.

Le triste constat est le suivant, l’homme du XXIème siècle consomme 10 fois plus de sucre par an que celui du XIXème et 40 fois plus que les chasseurs cueilleurs du paléolithique supérieur… qui avaient pourtant sensiblement la même conformation et les mêmes besoins alimentaires que l’homme moderne. Ceci entraîne l’épidémie d’obésité constatée dans les pays riches autant que dans les pays émergents. Un jeune américain sur 3 est obèse et un européen sur 4. Le coût humain de l’obésité (pathologies et mortalité), sans parler du coût de la prise en charge tardive (insuffisante et rarement curative) qu’elle entraîne est considérable.

Parmi les troubles du comportement alimentaire, on trouve aussi des anorexiques/boulimiques qui se font vomir pour garder un contrôle sur leur poids. Ces sujets combinent un besoin irrépressible de se remplir, pour toutes les raison évoquées dans le cas des boulimiques ordinaires, associées à un désir de contrôle de leur poids qui s’exerce a postériori, en rejetant tout ou partie de leurs repas. Certains d’entre eux parviennent ainsi à exercer un contrôle efficace de leur poids, au point qu’ils présentent souvent un gabarit standard, voire une maigreur excessive. Ces vomissements forcés à répétition constituent d’ailleurs aussi une stratégie complémentaire de certains sujets anorexiques pour maigrir davantage.

Chez les uns comme chez les autres, ils ne sont toutefois pas sans inconvénients pour le système digestif. Par ailleurs, ces sujets répandent fréquemment une odeur aigre de régurgitations gastriques quasi-permanente qui incommode leur entourage, lequel ne peut ainsi rien ignorer de leur trouble du comportement alimentaire.

Ainsi, soigner les troubles du comportement alimentaire ne relève pas seulement du travail pédagogique du diététicien qui informe et s’adresse à la raison des malades, mais aussi et surtout du psychologue, de l’addictologue et/ou du psychiatre, pour les cas les plus graves. Ces thérapeutes ont pour mission de tenter de réconcilier les patients avec eux-mêmes, mettre en perspective leurs blessures d’enfants et tenter de les arracher à leur perception distordue d’eux-mêmes, des autres, du monde, de leurs démons et de leurs comportements alimentaires délétères. Et, pour ce faire, on mesure trop souvent combien l'entretien thérapeutique est en échec, puisqu’il s’adresse au cerveau analytique du patient (ou cerveau gauche)... alors que son trouble est d’origine émotionnelle. Les activités qui favorisent le lâcher-prise du cerveau gauche (cerveau émotionnel ou analogique) dans la pleine conscience de l’instant présent sont encore insuffisamment explorées.

Parmi celles-ci, l’art-thérapie (danse-thérapie, photographie-thérapie, musique, équithérapie etc.), le yoga ou l'hypnothérapie et les massages de pleine conscience sont des voies à explorer avec rigueur et prudence mais qui – ramenant le malade dans son cerveau émotionnel – offrent quelques perspectives de l’éloigner des chimères d’un cerveau gauche enfiévré, pour faire lâcher prise à la maladie, pour deux heures, deux jours, deux ans… ou davantage.

Il existe également plusieurs traitements chirurgicaux de la boulimie (pose d'anneaux gastriques, rétrécissement de l’estomac, réalisation de by-pass, par exemple). Ces traitements ne doivent être envisagés qu’en toute dernière extrémité et pour des patients réputés incapables de relever d’une approche psychologique (ou psychiatrique). Comme évoqué ci-dessus, la boulimie n’est que le symptôme d’un désordre ou d’une blessure psychologique et il est aberrant de vouloir traiter ledit symptôme en négligeant la cause réelle qui est de nature psychologique.

Je citerai ici l’exemple d’un patient en sérieux surpoids qui a été dirigé vers la pose d’un anneau gastrique il y a quelques années. Il n’a alors pas même reçu d’information quant aux traitements psy alternatifs. Il n’a d’ailleurs depuis reçu aucun suivi psychologique, ni médical, pas même un “mode d’emploi” des bonnes pratiques pour perdre du poids.

Quatre ou cinq ans plus tard, il n’a pas perdu de poids et se repent amèrement d’avoir ignoré les thérapies des troubles du comportement alimentaire et rêve la nuit qu’il s’arrache son anneau gastrique à main nue, tant il est déçu, en colère et décidé à rattraper les années perdues. Il est également bien décidé à reprendre les choses à la base ; c'est-à-dire à entamer une psychothérapie (par exemple) pour soigner la cause cachée de sa boulimie et non son symptôme visible. Cet exemple illustre bien ce que les patients ont à gagner dans un dialogue, entre les médecins (ou les chirurgiens) et les thérapeutes du bien-être psychocorporel (psychologues, psychiatres et autres thérapeutes, voire praticiens des médecines douces), tel que la plateforme Spring-MediCare.fr (https://www.spring-medicare.fr/) vise à l’instituer.

Le partage de nourriture, un symbole…

Le lait maternel est le premier symbole de l’amour de la mère pour son enfant, puisqu’il est extrait de son propre sein, de sa propre chair. La Cène au cours de laquelle le Christ institue l’eucharistie – c’est-à-dire le partage de Son corps et de Son sang – est aussi une manière de transposition de l’amour maternel vers l’amour divin. L’offrande et l’échange de nourriture ont ainsi une valeur symbolique dans toutes les civilisations et une valeur sacrée dans plusieurs religions qui font des offrandes de nourriture (aux dieux ou aux mânes des morts etc.) un élément rituel incontournable.

Dans la vie profane (comme dans certaines sectes ou sociétés secrètes), les banquets ou les agapes, ont une fonction analogue. De même manière, les repas familiaux ordinaires, dominicaux, festifs ou solennels constituent un ciment de la vie sociale. Dans le contexte professionnel, politique ou sportif, ces rituels d’échange ou d’offrande de nourriture favorisent également la communication, la mise en confiance et la conclusion d’accords ou d’affaires. Ceci peut se résumer par le terme de convivialité précisément créé pour décrire le sentiment ou l’état collectif que peut/doit générer le partage d’un repas.

Qu’il s’agisse d’agapes, de banquets institutionnels ou seulement de repas familiaux, la dimension sacrée de la nourriture et la charge émotionnelle qui l’entoure ne peuvent ainsi être ignorées, lorsqu’il s’agit d’aborder, même superficiellement, les problématiques relatives aux comportements alimentaires.

Dans ce contexte, on peut distinguer différentes manières d’adhérer à ces rituels de partage et de convivialité ou au contraire de s’y soustraire.

Certaines personnes sont ainsi peu enclines à partager ou donner de la nourriture (mais souvent également des compliments, des encouragements, du plaisir, de l’argent). Elles paraissent attendre peu des autres (au plan émotionnel tout au moins), sans doute par crainte d’être dépassées, pillées ou ruinées. On les taxe de manque d’empathie. Elles peuvent par exemple penser : « Si je donne un doigt, on va me prendre la main ». Elles ne font ainsi de la bonté et de la solidarité non pas une vertu mais une faiblesse, une menace.

D’autres au contraire ne considèrent la vie que dans la perspective de l’échange (intellectuel, émotionnel…). Elles sont ainsi prêtes à donner et partager sans calcul et souvent davantage qu’elles ne reçoivent, pourvu qu’elles restent dans l’échange, dans la vie.

Les premières sont dans la méfiance et le calcul. Les seconds sont dans l’empathie, la confiance et l’enthousiasme. Elles peuvent tomber sept fois… et se relèveront huit fois. Mais (est-ce paradoxal ?) celles qui donnent le plus sont également celles qui attendent le plus de l’autre ou des autres.

Il n’est en outre pas rare que, dans un couple en particulier, l’un (plus empathique) soit dans le besoin vital d’échange, de compliments ou de convivialité, quand l’autre à l’inverse est plus en retrait, avare de tendresse et de compliments, réfractaire au concept de convivialité et ainsi peu enthousiaste à l’idée de recevoir trop bien et/ou trop souvent famille et amis. Pourtant, les contraires s’attirent semble-t-il souvent et il est courant que dans les couples l’un réfrène ou modère l’autre qui se sent ainsi frustré, incompris ou rejeté.

Au rebours des équilibres qui s’établissent (de manière plus ou moins harmonieuse) entre conjoints, les enfants qui s’invitent au sein des familles n’en ont pas choisi les membres. Ils sont alors des témoins ballotés entre des personnalités généreuses ou avares, ouvertes ou renfermées, aimantes ou froides et trouver sa place et parvenir à s’affirmer dans ces conditions peut passer par différentes souffrances… et troubles du comportement alimentaire.

Par Philippe Lamy, Fondateur de Spring-MediCare, à Lyon le 15/10/2020

Cet article n’est qu’une ébauche que je soumets à la communauté des thérapeutes de notre plateforme, avec l’espoir qu’ils y apporteront leurs critiques constructives et le compléteront par une réflexion plus fouillée et plus étayée au plan scientifique.

Cette rubrique est en effet destinée à s'enrichir d’articles complémentaires.. La seule contrainte pour les contributeurs, c’est qu’ils doivent confier à la plateforme un contenu original qui nous mette à la fois à l’abri des risques de rejet par les moteurs de recherche (pour duplicate content) et d’attaques en plagiat.

Plus qu'un annuaire, Spring Medicare propose aux thérapeutes de nombreux services pour les aider à trouver et développer leur clientèle, faciliter la gestion de leur activité, ou encore mailler un réseau professionnel avec leurs confrères.

Spring Medicare est une marque de l'entreprise Spring SAS. Les différentes fonctionnalités (édition des pages de contenu, prise de RDV, paiement en ligne...) ont été mises en place par la société Koudepouce SAS au moyen de technologies informatiques et logiciels propriétaires.

Tous Droits Réservés © 2023